LA BELGIQUE EST AU TOP

Paul Peeters (Agoria) trouve que nous devons cesser d'être modestes

Nous devrions être plus fiers de notre pays. Voilà l'idée récurrente dans la vision de Paul Peeters, moteur du programme Factories of the Future chez Agoria. Nous l'avons interrogé sur les modes et les évolutions, sur l'homme et la machine, sur la modestie belge et sur notre position au niveau européen.

 

Paul Peeters, Lead Expert chez Agoria
Paul Peeters, Lead Expert chez Agoria

BLOCKCHAIN INDUSTRIELLE

Nos lecteurs sont confrontés à diverses nouvelles technologies. Lesquelles sont vraiment pertinentes?

Paul Peeters : “Actuellement, je considère encore la blockchain pour l'industrie comme une mode. Elle fait couler beaucoup d'encre et beaucoup de salive, mais elle n'est pas encore pertinente à court terme. J'irais même jusqu'à placer également la réalité virtuelle et la réalité augmentée dans cette catégorie de mode. Les entreprises ne s'en préoccupent pas encore vraiment. Peut-être que les choses auront changé d'ici cinq ans, mais en attendant, ce n'est pas encore le cas."

Est-ce que cela ne traduit pas un fossé entre ce que les départements R&D des fournisseurs commercialisent et ce qui est effectivement nécessaire sur le terrain? Nous pensons par exemple à l'impression 3D et aux cobots.

Paul Peeters : "Pour les cobots, le but sera de répondre exactement aux besoins de l'entreprise. Dès qu'on sort de ce domaine-là, il y a d'autres solutions qui sont plus performantes, e.a. étant donné les exigences en matière de vitesse et de charge utile. Mais je pense que cette technologie va vraiment percer. Idem pour l'impression 3D, qui est en train d'atteindre sa phase de maturité. Nous sommes en train de quitter le stade du prototyping - auquel l'impression 3D est souvent associée. Par exemple, à la demande du marché, Sirris est en train d'élaborer une ligne d'essai où une imprimante 3D est directement intégrée dans la ligne de production. Je prévois donc les premières applications de ce genre d'ici deux à trois ans. La véritable percée devrait arriver d'ici cinq à dix ans. Les deux technologies ont un net potentiel. A terme, elles perceront complètement."

 

AI & CYBERSECURITY

Paul Peeters : “Je vois deux thèmes percer complètement comme composants de l'Industrie 4.0: l'intelligence artificielle et la cybersécurité. L'intelligence artificielle attend son tour depuis déjà un certain temps. On en parle depuis une dizaine d'années. A l'époque, la technologie n'était pas suffisamment avancée pour pouvoir traiter des données assez rapidement et il n'existait tout simplement pas assez de points de donnée. Aujourd'hui, cela commence à être le cas. La cybersécurité aussi devient un thème important. Les entreprises ne communiquent pas seulement en interne: elles partagent aussi de plus en plus d'informations avec des parties externes (des fournisseurs et des clients, mais aussi des tiers). On arrive alors automatiquement à Internet et au cloud, où l'on rencontre une certaine résistance. Beaucoup de PME ont peur de mettre leur serveur dans le cloud. Nous devons sensibiliser les entrepreneurs et les politiques aux dangers, mais aussi aux possibilités afin qu'ils puissent faire les bonnes démarches au bon moment."

Comment voyez-vous nos entreprises évoluerà long terme?

Paul Peeters : “On peut s'attendre à d'importantes évolutions. Celui qui développe aujourd'hui une vision et une stratégie claires pour son objectif 2030 en tant qu'entreprise, en cueillera les fruits plus tard. La production de petites séries sur mesure va entièrement percer. Les consommateurs obligeront l'industrie à adapter les produits à des besoins de plus en plus individuels. Les longs transports seront de moins en moins acceptés. Les produits personnalisés fabriqués localement ont un gros potentiel de croissance. Au moyen de configurateurs en ligne, les consommateurs peuvent décider de ce à quoi leur produit doit ressembler. L'industrie le produit ensuite de manière particulièrement rapide et efficace dans une usine performante et flexible proche du client."

 

INDUSTRIE 4.0

Que peut faire un CEO ou un manager de production pour contrer la résistance interne à l'Industrie 4.0?

Newtec
On associe d'emblée l'Industrie 4.0 à une automatisation poussée et à des robots. Mais l'exemple de Newtec prouve que ce n'est pas obligatoire: cette entreprise, elle, a opté pour une digitalisation extrême

Paul Peeters : "Une première remarque importante est que l'Industrie 4.0 ne peut jamais être un but en soi. Je la vois plutôt comme un ensemble de composants dans lesquels les entreprises peuvent piocher pour atteindre leurs objectifs plus rapidement et plus efficacement. Il se peut que l'entreprise A ait besoin d'une tout autre approche que l'entreprise B. Beaucoup associent d'emblée l'Industrie 4.0 à une automatisation poussée de la production et à des robots industriels. Mais je vous donne l'exemple de Newtec, l'une des premières Factories of the Future belges. Elle produit des appareils pour la communication satellite. Elle n'utilise aucun robot, mais a choisi une digitalisation très poussée. Ici, la grosse percée se situe dans un travail différent (digital) avec une modification complète de l'ADN de l'entreprise. Dans ce processus de changement, une communication ouverte basée sur une information 100% transparente s'est révélée cruciale. Résultat: un seul opérateur peut fabriquer jusqu'à 400 systèmes différents, alors qu'avant, il ne pouvait assembler qu'une dizaine de produits maximum. La digitalisation est la force facilitatrice, car elle aide les collaborateurs à effectuer cette transition. 
En contrepartie, le collaborateur a un job beaucoup plus intéressant. Il doit constamment relever des défis et apprendre de nouvelles choses plutôt que d'effectuer le même travail répétitif toute la semaine. Aucun employé ne veut revenir à l'ancienne méthode de travail."

 

L'IMPORTANCE DE L'HUMAIN

Les directions ne sont-elles pas réticentes face à la digitalisation et à l'automatisation, parce qu'elles ont peur de la réaction du personnel face à une réduction de l'emploi?

Factory of the Future
Ces 4 dernières années, les 20 lauréats des Factories of the Future Awards ont créé 13% de travail en plus

Paul Peeters : "A cet égard, je suis heureux de pouvoir dire que les vingt lauréats des Factories of the Future Awards ont créé 13% de travail en plus ces quatre dernières années. N'ayez donc pas peur du personnel: entamez le dialogue avec lui et avec les partenaires sociaux. Mais nous constatons à l'issue d'une enquête que c'est surtout le cadre moyen qui est dans une position délicate. La direction souhaite investir et les gens sur le terrain se rendent compte aussi que cela comporte des avantages pour eux. Mais la couche intermédiaire oppose une grande résistance. Il faut absolument une ouverture au changement. Et cette flexibilité semble souvent manquer au cadre moyen. En général, il s'agit d'anciens opérateurs âgés qui ont été promus et qui ne voient pas d'un très bon œil tous ces changements, avec toutes ces nouvelles technologies. Il faut donc y accorder l'attention nécessaire.“

Voyez-vous d'autres pièces dans la transition vers l'Industrie 4.0?

Paul Peeters : "La transition vers l'Industrie 4.0 - ou vers les Factories of the Future - est comme un sport de haut niveau", a dit un jour l'un de nos lauréats des Factories of the Future. C'est totalement vrai: il faut être passionné, ne pas perdre de vue son objectif et resté concentré … tout cela pendant des années. Je remarque aussi que nos lauréats ont acquis ces dernières années une certaine stabilité positive au niveau de la direction. Lors d'un rachat et/ou de changements trop rapides de directeur ou de direction, on assiste souvent à un changement de priorités. On n'a donc pas de politique rectiligne, chose indispensable dans cette transition. Continental en est un bel exemple. Sa stabilité à entraîné un processus d'amélioration continue qui porte ses fruits aujourd'hui. C'est tellement important pour une entreprise d'être dans le coup."

Et quid de l'aspect financier?

Paul Peeters : “L'Industrie 4.0 est née en Allemagne avec des mastodontes tels que BMW, Siemens et Bosch. C'est de là que vient l'idée qu'elle est réservée aux grosses entreprises avec une énorme puissance de frappe. Mais ses composants ne sont pas forcément chers. Arkite en est un parfait exemple. Cette start-up belge conquiert le marché avec un système d'assistance pour la projection. Il s'agit d'un système abordable qui rentre dans les possibilités de chaque PME. Idem pour l'intelligence artificielle. Ne pensez pas que cela vaut uniquement la peine pour les grosses entreprises de l'industrie de process qui brassent d'énormes quantités de données. Cette technologie est également très pertinente pour l'industrie manufacturière. Ne ratez pas ce train-là parce que vous pensez que ça ne concerne pas votre entreprise."

 

LA PUISSANCE DES RESEAUX

Paul Peeters : “La Belgique est un pays unique en Europe en matière de start-ups dans l'industrie manufacturière. Nos start-ups se situent surtout dans la sphère B2B, alors que, dans d'autres pays, elles sont plutôt actives en B2C. Cela ouvre de belles situations gagnant-gagnant. Il y a une possibilité unique pour nos entreprises manufacturières de s'adresser à ces start-ups. Ces dernières sont avant tout à la recherche de nouveaux clients pour pouvoir les présenter comme références à d'autres clients par la suite. Entourez-vous des bonnes start-ups, mais soyez aussi attentif à d'autres acteurs comme le centre technologique Sirris ou le centre de recherche stratégique Flanders Make, une autre entreprise ou une haute école ou une université. Je vois énormément de potentiel dans cette collaboration permanente avec d'autres acteurs sur la base d'un projet. Récemment, Duracell nous a sollicités pour qu'on lance ensemble un projet de cocréation avec plusieurs entreprises manufacturières et fournisseurs technologiques. Ils sont en train de rendre leur système de production 'intelligent', mais se rendent compte que leur connaissance combinée à celle d'autres acteurs peut les aider à atteindre cet objectif plus rapidement. Comme ces entreprises sont confrontées aux mêmes problématiques, cela peut se dérouler très efficacement.
A Saint-Trond aussi, on a récemment lancé un projet de cocréation. Punch Powertrain, Tenneco et Bosch Tirlemont vont créer ensemble une solide activité manufacturière dans la région et relever ensemble des défis comme la quête de personnel qualifié et la production plus efficace. Nous verrons certainement apparaître d'autres collaborations de ce genre à l'avenir."

 

FACTORIES OF THE FUTURE EN EUROPE

Les Factories of the Future Awards sont bien connues dans notre secteur. Dans la dernière édition, deux des quatre lauréats étaient des entreprises alimentaires. Remarquez-vous de grosses différences au niveau de l'innovation entre les secteurs?

Paul Peeters : "Chaque secteur a certains accents, mais je note moins de différences que ce à quoi je m'attendais. Les thèmes sont quasi similaires. Il n'y a que dans l'industrie de process que c'est différent, parce qu'on y trouve beaucoup de process continus. Mais en général, on voit souvent revenir les mêmes sujets. L'Industrie 4.0 fait tomber les murs entre les secteurs. On voit aussi que les fournisseurs de technologie fournissent de plus en plus de composants et de systèmes pouvant être utilisés dans plusieurs secteurs. Par exemple, la digitalisation est omniprésente. Même dans le bâtiment avec le programme BIM (Building Information Management), qui digitalise tout le processus de construction afin de rendre les bâtiments plus intelligents. Dans notre propre structure aussi, nous en tenons davantage compte en décloisonnant les départements."

Paul Peeters a encore une bonne nouvelle concernant les Factories of the Future: “Nous impliquons l'Europe. Notre démarche pour assister les entreprises manufacturières dans leur innovation vers l'Usine du Futur et pour récompenser les entreprises qui ont effectué la transition avec succès, n'a pas échappé à l'Europe. L'approche de la Belgique va inspirer toute l'Europe. Des pays comme les Pays-Bas et l'Allemagne nous observent pour voir comment nous faisons. Cela augmente la visibilité et le rayonnement de nos entreprises. Nos lauréats peuvent donc profiter doublement de la valorisation de notre programme Factory of the Future au niveau européen." 

 

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